Tout savoir sur la mise sous tutelle d’un majeur

La mise sous tutelle ne s’adresse pas qu’aux mineurs, elle existe également en tant que mesure de protection juridique pour les majeurs. Comme nous le verrons, elle concerne souvent les membres de la famille, mais là encore pas toujours puisque sous certaines conditions, elle peut être demandée pour un ami proche. Il s’agit d’une démarche qui fait directement intervenir les autorités judiciaires et dont les enjeux ne correspondent à rien de moins que la sauvegarde du bien-être et des intérêts d’une personne. C’est pourquoi il est important de savoir précisément de quoi elle retourne, comment en faire la demande et ce qu’elle change ou non pour un proche aidant.

Jérôme Besson

Un article de

Jérôme Besson
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Co-fondateur
14/6/2022
Mis à jour le
14/1/2025
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Dans cet article

Quels enjeux et qui prend la décision de mettre une personne sous tutelle ?

Définition de la mise sous tutelle

La mise sous tutelle est une mesure de protection juridique des majeurs qui résulte d’une décision judiciaire et qui encadre une partie des actes de la vie civile d'une personne majeure présentant une altération significative de ses facultés mentales et/ou physiques. La décision du juge fait le plus souvent suite à une demande d’un parent ou d’un proche mais peut dans certains cas être l’objet d’une demande d’un procureur de la république.

La mise sous tutelle apparaît à plusieurs reprises dans le chapitre II du livre Ier du code civil, articles “Des mesures de protection juridique des majeurs (Articles 425 à 494-12)”. Notamment dans les articles 425 et 440. Elle est régulièrement citée aux côtés de la curatelle, l’autre grande mesure de protection juridique des majeurs.

Quelles sont les conditions pour mettre une personne sous tutelle ?

La mise sous tutelle est destinée à protéger les personnes vulnérables qui ne sont plus capables de gérer seules leurs propres intérêts. L'objectif principal de la mise sous tutelle est de veiller que la personne protégée ne prenne pas de décision importante qui pourrait être contraire à son intérêt (surtout concernant sa santé et sa sécurité), tout en préservant autant que faire se peut sa dignité et sa volonté propre.

La tutelle est une option envisageable lorsqu’un parent âgé (ou un proche) est en situation de perte d’autonomie lourde, que ce soit en raison :  

  • d’une situation de handicap mental ;

Quoiqu’il en soit, la demande de mise sous tutelle est toujours une décision mûrement réfléchie et dans l’intérêt du proche ou du parent concerné.

Comme évoqué en début d’article, c’est une démarche qui ne peut aboutir que par décision d’un juge, et en l’occurrence un juge des contentieux de la protection (auparavant appelé juge des tutelles). C’est à lui qu'incombe la responsabilité de vérifier que la mesure est :  

  • Fondée ;
  • Proportionnée à l’état de santé de la personne sous tutelle.

Concernant ce second point, le juge doit en effet s’assurer que la tutelle ne limite que les actes civils que la personne n’est plus en état d’effectuer elle-même sans risquer de nuire à son intérêt ou à sa sécurité, du fait de sa perte d’autonomie. Il veille en outre à ce que les droits fondamentaux de la personne soient respectés.  

Acteurs mise sous tutelle

Effets de la mise sous tutelle sur les actes de la vie courante

Une mise sous tutelle relève donc du cas par cas, le juge décidant des actes que la personne peut effectuer en autonomie et ceux pour lesquels elle a besoin de son tuteur ou de sa tutrice.

Les actes les plus fréquemment et directement restreints par une mise sous tutelle sont la vente du domicile ou la gestion du compte bancaire par la personne sous tutelle sans l’autorisation du tuteur. Cela permet d’éviter que des décisions inconsidérées ou influencées par des tiers mal intentionnés ne mettent en péril le patrimoine ou le bien-être de la personne protégée.

Autre exemple fréquent d’actes encadrés par une tutelle : les décisions relatives aux soins médicaux. Ainsi, un tuteur peut être amené à décider d’un traitement médical, en concertation avec le médecin traitant de la personne protégée.

Enfin, cette mesure peut contribuer à réduire les conflits entre les membres de la famille, notamment lorsque plusieurs proches souhaitent intervenir dans la gestion des biens ou des décisions importantes pour le parent âgé. Le rôle du tuteur, nommé par le juge, est un cadre légal incontestable.

Mise sous tutelle d’un proche : Quelles étapes ?

Procédure pour une demande de mise sous tutelle

La première étape pour mettre un parent sous tutelle consiste à effectuer une demande officielle auprès du juge des contentieux de la protection. Il n’y a d’ailleurs pas nécessairement besoin d’être de la même famille, cette demande peut aussi émaner :  

  • d’un partenaire de PACS ;  
  • d’un conjoint ;
  • d’un concubin vivant avec la personne à protéger ;
  • d’un membre de la famille par alliance ;
  • d’un ami proche ;
  • D’un procureur de la République ;
  • de la personne elle-même.

Dans tous les cas, la demande doit être accompagnée d’un dossier de demande contenant plusieurs pièces à fournir :

  • une copie de la carte d'identité de la personne à mettre sous tutelle et la même chose pour la personne qui fait la demande ;
  • une lettre de demande décrivant les faits ;
  • un certificat médical circonstancié faisant état de la dégradation de l’état de santé et de la perte d’autonomie (pour que le juge puisse prendre la décision la plus adaptée) ;  
  • une copie (de moins de 3 mois) de l’acte de naissance de la personne à protéger.
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Précisions sur le certificat médical circonstancié

Ce certificat est délivré suite à une consultation médicale au cours de laquelle, le médecin examine :

  • les facultés mentales du parent concerné ;
  • les capacités physiques à gérer ses affaires personnelles ;
  • les risques éventuels liés à la gestion autonome de son patrimoine.

Cela lui permet d‘indiquer au juge les conséquences sur la nécessité d’être assisté pour certains actes ainsi que l’évolution possible de l’état de santé du patient.

Attention, deux critères à remplir pour le choix du médecin ;

  • il ne peut pas s’agir du médecin traitant ;
  • le médecin doit faire partie d’une liste agréée par le procureur de la République, disponible auprès du greffe du juge des contentieux de la protection (s'adresser au tribunal judiciaire).

Audience

Après étude de la demande, le juge fait organiser une audience en présence du parent/proche ainsi que des membres de la famille ou de l’entourage impliqués dans la demande de mise sous tutelle.

Il est alors donné à chaque partie la possibilité de s’exprimer et de présenter des arguments en faveur ou contre la mise en place de la tutelle.

Le juge rend ensuite sa décision. Si la tutelle est accordée, le juge désigne un tuteur pour la personne concernée. Si un désaccord survient ou si une des parties souhaite contester la décision, il est possible de faire appel de la décision devant une cour d'appel. Le délai d'appel est généralement de 15 jours après la notification de la décision.

Étapes demande mise sous tutelle

Mise sous tutelle d’un proche et rôle d’aidant

Devenir tuteur : conséquences

Bien entendu, le rôle du tuteur dans la gestion de la vie de la personne protégée est absolument central. Il est chargé du bien-être du parent sous-tutelle mais aussi de la protection de ses biens.

À ce titre il devra principalement (toujours en fonction de la décision du juge ; décision qui peut d’ailleurs changer à tout moment) :  

  • gérer les comptes bancaires ;
  • prendre des décisions médicales ;
  • gérer certaines démarches immobilières, par exemple la résiliation d’un bail d’habitation. ;
  • représenter le parent sous tutelle dans les démarches administratives.

Le rôle du tuteur doit être exercé en toute honnêteté et dans les propres intérêts de la personne protégée. Par ailleurs, il y a un suivi judiciaire puisque le tuteur doit également rendre compte de ses actions au juge de contentieux de la protection à intervalles réguliers, notamment en présentant un rapport de gestion annuel.

Accompagnement et cohésion familiale

Dans les faits, le rôle de tuteur vient souvent s'ajouter à celui d’aidant familial puisqu’en tant que proche aidant, on est souvent la personne la plus susceptible d’émettre une demande de mise sous tutelle et souvent la personne la plus à même de devenir tuteur.

Attention cependant, dans l’intérêt du proche aidé et mis sous tutelle, il est indispensable que le proche aidant continue de jouer son rôle d’accompagnement, même après avoir été désigné comme tuteur. De même, à l’inverse, le rôle d’aidant ne doit pas entraver les devoirs du tuteur.

Si l’aidant familial n’est pas tuteur, il faut qu’il s’assure que toute la famille comprenne bien la situation et qu’il favorise les échanges tuteur/famille pour dissiper le moindre malentendu. En cas de conflit durable entre les membres de la famille, l'intervention d'un assistant social ou d'un avocat expert en droit des majeurs protégés peut être envisagée pour trouver un terrain d'entente.

L'aidant doit également veiller à ce que le parent sous tutelle comprenne lui aussi les décisions prises en son nom et à ce que la communication reste claire et apaisée. De même, pour tout le monde, la mise sous tutelle doit être perçue comme une mesure de protection, et non comme une privation de liberté. L’objectif étant, on le rappelle, de garantir le bien-être de la personne protégée tout en préservant, autant que possible, son autonomie et ses propres intérêts.

En résumé, si la demande de mise sous tutelle est légitime et pour peu qu’elle ne suscite pas d’opposition de la part d’un autre membre de l’entourage du proche aidé, alors c’est une démarche relativement simple et rapide ; ce qui se comprend bien au vu des situations mises en jeu. Ceci dit, c’est un devoir légal et une responsabilité supplémentaire lourde de conséquences puisque le tuteur a le bien-être d’une personne entre ses mains.

Pour ce qui est du rôle d’aidant familial, chez Monka, nous vous accompagnons pour vous aider à mieux comprendre et gérer cet ensemble de responsabilités, à anticiper les futurs besoins de vos proches et nous vous donnons accès à des conseils adaptés et validés par divers professionnels de santé. Découvrez Monka !

À retenir : Mise sous tutelle personne majeure

Quel est le coût d’une mise sous tutelle ?

La demande et la procédure judiciaire sont en elles-mêmes gratuites. Cependant, il faut impérativement joindre au dossier un certificat médical circonstancié, ce qui nécessite une procédure spéciale auprès d’un médecin agréé. Ce certificat coûte 192 euros, à la charge de la personne protégée sauf si cette dernière n’a pas les ressources financières pour s’en acquitter ou que le juge décide que le cas justifie de ne pas devoir s’acquitter de ces frais.

Quels sont les inconvénients d’une mise sous tutelle ?

Pour la personne protégée, si elle a conscience de ce qu’il se passe, elle peut ressentir une dépendance totale vis-à-vis du tuteur. Côté entourage, c’est une procédure qui peut faire émerger des conflits si elle est mal expliquée. Pour le tuteur, c’est un devoir légal qui lui prend du temps et auquel il ne peut se soustraire.

Où va l’argent d’une personne sous tutelle ?

Sauf si le juge décide du contraire, l’argent d’une personne mise sous tutelle ne change pas de banque mais le tuteur récupère les droits de gestion et d’administration des comptes bancaires. Ces droits sont limités, un compte ne peut par exemple pas être clôturé sans l’aval du juge. De plus, le tuteur doit tenir un compte de gestion annuel où il indique tous les mouvements de fonds effectués. Le juge a accès à ce compte pour vérifier que l’intérêt de la personne protégée est bien préservé.